Compétences qui s’usent plus vite, attentes divergentes selon les âges, et une nouvelle génération qui ne transige pas : la formation est prise en étau. Elle doit changer d’échelle, de réflexes, et surtout de logique. Les directions formation n’ont plus le choix : elles doivent composer avec quatre générations au travail, et placer la personnalisation au cœur de leur action.
Sur fond d'obsolescence ultra rapide des compétences, la formation ne peut plus faire l’économie d'une refonte profonde. Les Directions Formation doivent aujourd’hui composer la diversité générationnelle. Quatre générations cohabitent dans les organisations, avec des attentes et des usages d’apprentissage radicalement différents. Une situation inédite, qui rend caduque toute approche uniforme. Pour peu qu'elles veuillent continuer à recruter, faire monter en compétences et garder les bons profils, les entreprises doivent changer de logiciel.
Revue de détail…
La formation sous pression : La durée de vie des compétences s'effondre. Dans certains métiers, un savoir devient obsolète en moins de trois ans. La cadence s'accélère. L'explosion des usages IA, la généralisation de la donnée et la robotisation imposent un apprentissage continu, contextualisé, personnalisé. Le modèle du stage ponctuel est à bout de souffle. Il faut produire du sur-mesure réactif, pensé pour être utilisé, pas simplement suivi. Or, dans la plupart des entreprises, le changement n'est pas encore à la hauteur de l'urgence.
Un paysage générationnel sans précédent : Quatre générations coexistent : baby-boomers, Gen X, millennials, Gen Z. Chacune avec ses codes. Les premiers chercheraient de la transmission, du lien, des formats familiers. Les deuxièmes sont réputés pragmatiques, orientés résultats. Les troisièmes attendent de la tech, du feedback, de la mobilité. La dernière, mobile native, veut des contenus immersifs, visuels, courts, utiles. Bien qu'on ne puisse former un manager de 50 ans comme un tout jeune diplômé, l'offre de formation reste pourtant souvent indifférenciée. Les mêmes parcours pour tous, les mêmes formats imposés. À l'heure de la personnalisation massive dans tous les secteurs, la formation ne peut plus faire exception.
Focus sur la Gen Z (ça commence maintenant !) : Déjà présente dans les entreprises, la génération Z pèsera bientôt 30 % de la force de travail. Ultra-connectée, exigeante, en quête de sens, elle juge l’entreprise sur sa capacité à la faire progresser. Pas question d’attendre trois ans pour accéder à une formation digne de ce nom. Ce qu’ils veulent, ce sont des occasions d’apprendre en continu, des repères de progression, et un lien clair entre ce qu’ils apprennent et ce qu’ils deviendront. Autrement dit, pas de carrière sans formation. Et pas de rétention sans visibilité sur la suite. La formation devient leur critère numéro un. C’est une arme de recrutement, d’intégration et de mobilisation.
Personnalisation ou décrochage : C’est le nouvel horizon. Il ne suffit plus de proposer un catalogue. Il faut construire des parcours adaptés, activables rapidement, porteurs de reconnaissance. Les outils sont là : plateformes adaptatives, IA, open badges, analyse de données. Mais sans stratégie explicite, ils restent sous-exploités. Être personnalisé, ce n’est pas être seul. Cela suppose aussi du lien, du suivi, de l’échange. C’est cette combinaison entre individualisation des contenus et socialisation de l’expérience qui rend la formation vivante. Et engageante. Le reste ne fait que remplir des statistiques. Dans ce contexte, la formation n’est plus un simple service support ; elle est le puissant levier de transformation d'un terrain commun entre les générations. Là où l’on peut faire circuler les savoirs, valoriser les expériences, croiser les visions. Dans un environnement fragmenté, où les lignes hiérarchiques et les parcours s’entrelacent, elle reste un espace où chacun peut trouver sa place. Mais cela suppose de sortir des logiques formatées, et d’assumer enfin que former, c’est différencier.
Cohabiter sans formater : Pour servir quatre générations sans se disperser, il faut faire des choix clairs. Côté stratégie, cela implique d’assumer une segmentation non pas sur les postes, mais sur les usages, les rythmes, les formats. C’est une bascule vers une logique d’offre internalisée : la formation devient un fournisseur de solutions multiples, orchestrées et cohérentes. Côté outils, cela exige une plateforme robuste mais modulable, capable de servir plusieurs types d’expériences sans se perdre dans la complexité. Côté équipes, il faut des professionnels de la formation capables de combiner pensée systémique, veille active, culture de la donnée et compétences relationnelles. Cela suppose aussi une organisation du service formation moins pyramidale, plus matricielle, où les rôles de design pédagogique, d’animation, de pilotage et d’interface avec les lignes métiers sont clarifiés et mieux distribués. Il faut enfin fixer une limite à la personnalisation, pour ne pas basculer dans un cloisonnement par génération : l’enjeu, ce n’est pas de tout personnaliser pour tout le monde. C’est d’identifier ce qui compte pour chacun, et de savoir le servir à la bonne maille, sans compromettre le socle commun qui fait collectif.
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